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 tradition psychologie contemporaine

tradition psychologie contemporaine

Tradition Psychologie Contemporaine est le nom d'une Association créée à Paris, en 2000 pour répondre à la recherche du mieux-être et aux problèmes sociaux et familiaux, par la création de lieux d’information et de pratiques de toute méthode thérapeutique, holistique, ou artistique,dans le respect de l’identité culturelle et cultuel de chacun.


LE DIALOGUE

Publié par Professeur Eliane Amado Levy Valensi zal sur 4 Avril 2010, 15:31pm

Catégories : #TRADITION

LE DIALOGUE

 

 « Il n'est pas bon que l'homme soit isolé.

Je lui ferai une aide comme son face à face. »

Gen. II, 18.


C'est au moment où, dans la Genèse, l'homme nomme les animaux, dans un rapport essentiellement  asymétrique, que le Créateur s'avise qu'il n'a pas d'aide (Ezer)  comme  « contre lui » ou comme s on face à face (Ke-neguedo).

L'essence de l'homme a déjà été créée en Genèse I. Dieu crée l'homme à son image et Le crée mâle et femelle. En Genèse II on aborde déjà le compromis de l'histoire, celui de l'existence concrète qui en fonction de quelque apriori biologique inscrit l'homme dans l'histoire avant la femme. Contingence historique et non essence. Le livre I de la Genèse est là pour le dire, et le commentaire, tant Talmud que Zohar, insiste sur cette essence de l’homme qui n'est « semblable à Dieu » que dans l'union du mâle et de la femelle, de l'homme et de la femme.

Mais sur quoi se fonde cette union? Non pas sur le « croissez et multipliez» qui a été dit en premier lieu aux animaux et qui, répété à l'homme, l'inscrit dans l'univers biologique.

Non. La spécificité du couple humain n'est ni reproductrice ni sexuelle.

Elle est dialogale.

La fonction d'Ève, face à face, est de sortir Adam de son rapport asymétrique avec les animaux. Il nomme, ils sont nommés. Personne ne lui renvoie la parole. Personne ne témoigne de sa rectitude ou de son égarement. L’Ezer Ke-neguedo est ambigu.

Le Talmud le souligne : quand l'homme est bon, la femme est pour lui une aide (Ezer). Quand il est mauvais, elle est contre lui (neguedo) et encore : pas vraiment contre lui mais « comme » (Ke) contre lui.

C'est à-dire qu'elle s'oppose à lui mais dans une fonction de redressement. Il va sans dire, mais peut-être vaut-il mieux le dire quand même, que dans le développement de l'histoire et de l'intersubjectivité ce « témoignage » est essentiellement réversible.

Chaque couple témoigne dans sa rencontre de la rectitude ou du gauchissement de chaque partenaire. Que cela ne passe que par la parole est évident. Pourtant la parole reste essentielle et il faut une certaine maturité pour y accéder.

Ainsi, que l'on relise attentivement le texte biblique. Adam et Eve disposent de la parole mais n'échangent pas une seule parole expresse dans le récit de leur naissance et de leur chute.

Ils parlent, certes. Ils se parlent à eux-mêmes. Ils parlent à Dieu et au besoin au serpent. Ils ne se parlent pas.

André Neher à qui je faisais part de cette observation me fit remarquer qu'il fallait attendre la génération d'Abraham et Sarah pour voir la parole instaurée dans le couple. Le dialogue entre l'homme et la femme prendra corps. Or ce sera le  sens même de cette onzième épreuve que nous tenterons de dégager que d’être l’accession au dialogue…

 Abraham est l'homme du dialogue spécifiquement inauguré : avec Dieu, avec la Femme et par là même avec l'autre homme quel qu'il soit.

Cet Autre dont la présence s'ébauche aux confins de l'entité abrahamique s'inscrit peut-être comme l'une des promesses non encore advenues de l'histoire. Voire comme la promesse non encore advenue. Elle ne s'en inscrit pas moins, aux origines de l'histoire, comme sa condition.

L'humanité a le choix, ne cesse d'avoir le choix entre l'entité caïnique du fratricide et l'entité abrahamique de la fraternité.

Peut-être l'Alliance inscrit-elle cette fraternité comme gagnant d'une longueur sur la tentation du fratricide. La tentation est toujours présente, mais il reste, quelle qu'en soit l'ampleur, à toutes les époques, une poignée d'hommes - trente-six justes, dit la Tradition ; voire un seul, dit le Zohar - pour la dénoncer et sauver l'histoire.

Abraham s'inscrit d'emblée comme interlocuteur possible : présence affirmée, responsabilité tenue, fermeté dans l'épreuve et les épreuves, cet homme - ce premier homme véritable de l'histoire, pouvons-nous dire - tient.

Il tient au sens plein du terme. Pilier de l'histoire, il prend en charge le passé branlant et déjà sanglant des générations qui l'ont précédé où planent déjà la menace de destruction et des malédictions dont les ramifications, on le verra, traversent sa propre histoire.

Il tient dans le présent les promesses de son propre itinéraire assurant et dépassant ses propres doutes, ses stupéfactions devant les promesses qu'on lui fait et devant celles qui sont exigées de lui. Il tient - d'avance - les promesses de l'avenir.

Le temps s'inscrira - et Pascal l'avait compris - non pas dans le temps des philosophes mais dans celui du « Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob » invoqué comme tel dans les prières.

Un temps progressif, un temps dialogal qui, nous le verrons, implique le rapport de Dieu et de l'homme, de l'homme et de la femme, de l'homme et de l'autre homme, dans cette organicité que nous avons déjà tenté d'indiquer et dont nous voudrions approfondir le sens, démonter le caractère sine qua non de solidarité profonde entre les parties. Le dialogue est la condition de l'histoire.

 Ce que Raphaël Draï dénonce comme l'inhibition qui dans le monde moderne rend impossible le dialogue politique et en fait « avorter, à la source même», la temporalité, ne peut se déjouer que dans l'affrontement de l'explication proprement dite, avec ce qu'elle implique d'attention à autrui, de courage, de compromis provisoires en attente de solutions jamais définitives - car l'histoire et l'homme sont en chemin.

Abraham est dans cette ligne. Non pas dans celle du recours à une puissance magique de la parole parlée sur laquelle comptait Hitler, mais dans celle du verbe à la fois retenu et assumé, dans sa simple énonciation qui, contre toute jonglerie verbale, est aussi une énonciation simple.

Du Hineni d'Abraham découle son aptitude à l'épreuve et s'éprouve le discours qui façonne autrui, l'élève à une aptitude nouvelle, celle de la rencontre. Abraham est l'homme du geste retenu et contrôlé, de l'acte assumé, de la parole transmise, l'homme d'une Tradition.

Mais l'homme tel qu'il est aujourd'hui est en porte à faux sur la Tradition.

Conservateur, répétitif ou au contraire ivre de « révolution », il n’est pas, assumons de dire qu’il n’est pas encore, l’homme de la filiation abrahamique, qui est l’homme d’une histoire assumée, d’une épreuve surmontée dont chaque épreuve d’Abraham indique et cerne un sens qui les porte et les dépasse, les inscrivants dans un ensemble porteur par là même de Sens.

Professeur Eliane Amado Levy Valensi zal
  La onzième épreuve d’Abraham Ch. 1- Extraits (J.C Lattes, Paris 1981)

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